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Pierre-Paul Raoul Colonna de Cesari Rocca

Vengeances Corses

9781465663153
213 pages
Library of Alexandria
Overview
« Prima lex est ulcisci — La première loi du Corse est de se venger », dit un vieux distique anonyme attribué à Sénèque probablement à tort, mais en tous cas fort ancien. Un Corse du moyen âge auquel on ne saurait reprocher de ne pas aimer sa patrie dont il fut plus l’apologiste que l’historien (Petrus Cyrnæus) écrivait: « Les Corses aiment les factions et ont soif de victoires ; avides de vengeance, s’ils ne peuvent l’obtenir ouvertement, ils emploient des embûches, la ruse et tous les modes d’artifices pour atteindre leur but. » « Qu’il soit vivant, qu’il soit mort, redoute le Corse qui n’a pas satisfait sa vengeance », dit un proverbe italien du XVIIe siècle. Et Stendhal: « Ils ne songent qu’à deux choses : se venger de leur ennemi et aimer leur maîtresse. » Ces quatre jugements portés en des siècles bien différents sur la caractéristique essentielle des mœurs corses serviront d’épigraphes aux pages qui vont suivre. La tendance de l’homme à se faire justice soi-même est instinctive. Par loi de nature il écarte ou détruit tout obstacle à sa conservation ou à son bien-être. Si un accident lui arrive, si un malheur le frappe, les causes de cet accident, de ce malheur lui seront toujours un souvenir pénible, même si ces causes sont d’ordre matériel. Mais quand la catastrophe dont il a été victime a pour auteur un être conscient qui, volontairement, a provoqué sa douleur ou son mécontentement, qui, ensuite, a tiré de son succès unesatisfaction outrageante pour lui, l’homme veut à son tour la satisfaction adéquate qui ne se peut obtenir que par une souffrance égale ou supérieure chez celui qui l’a offensé. Quand la société préside à cet acte de compensation, c’est la justice ; sinon c’est la vengeance. Mais il est rare qu’un équilibre absolu soit établi entre le crime et la sanction exercée par la justice individuelle, c’est-à-dire par la vengeance. Celle-ci, d’ailleurs, eût-elle strictement observé la loi du talion « dent pour dent, œil pour œil », il est certain que celui qui est frappé par cette condamnation n’en appréciera pas l’équité. Si son adversaire a été juge et partie, lui s’est trouvé accusé et partie. A dater de l’exécution de la sentence mentalement prononcée, les rôles s’intervertissent et l’accusé, le condamné de la veille, devient juge à son tour. C’est la vendetta.