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Une grande dame de la cour de Louis XV: La duchesse d'Aiguillon (1726-1796)

9781465667557
213 pages
Library of Alexandria
Overview
Deux charmants érudits, M. Paul d’Estrée et M. A. Callet, ont uni leur savoir et leur talent pour écrire ce livre, dont le cadre est beaucoup plus vaste que le titre en sa modestie ne consent à nous l’indiquer; car voici en réalité une histoire de la fin du règne de Louis XV et du commencement de celui de Louis XVI, de cette époque inquiète, troublée, troublante, où, sans que les contemporains s’en doutassent, se jouaient, autour de futiles intrigues de Cour, les destinées d’un peuple, on peut dire d’une civilisation. La bonne et intelligente duchesse d’Aiguillon sert de guide en ce dédale souvent confus—confus, non par le fait des auteurs, mais par celui des événements, multiples et complexes, qu’ils avaient à présenter. M. Paul d’Estrée est un historien du théâtre, un des plus brillants lauréats de la Société de l’Histoire du Théâtre, et peut-être nous pardonnera-t-il la familiarité trop grande de la comparaison que nous oserons hasarder, et sans doute nous la pardonnera-t-il d’autant plus volontiers que c’est du «petit» théâtre, du théâtre de foire et de tréteaux, qu’il s’est occupé avec le plus d’érudition et de succès. Mᵐᵉ la duchesse d’Aiguillon nous fait penser en ce livre à une commère de revue; oh! à une commère très distinguée, très réservée, très grande dame; mais en somme à une commère qui joue en réalité un rôle secondaire dans l’ouvrage, mais qui en est le guide, parmi tant de faits divers et pressés l’un sur l’autre; guide gracieux qui permet au spectateur, je veux dire au lecteur, de comprendre et de s’y retrouver. Et comme il s’agit d’un livre, notre commère ne parle pas comme en une pièce de théâtre, elle écrit—d’une plume alerte, limpide, intelligente et gracieusement française—des lettres qui sont autant de foyers de lumière dans l’ensemble du récit. Ces lettres, pour la plupart inédites, retrouvées par MM. Paul d’Estrée et A. Callet en des sources diverses, éclairent non seulement le caractère de l’active et charmante duchesse, mais les nombreux événements auxquels, de par les fonctions et les faits et gestes de son mari, elle s’est trouvée directement mêlée. Nouvelle et importante contribution à cette histoire, tant discutée depuis quelques années, du duc d’Aiguillon, de son administration, de sa direction au ministère des Affaires étrangères, et dont Balzac, par ce génie de divination historique qui l’a si étonnamment caractérisé, prévoyait dès 1828 les conclusions de plus en plus généralement admises aujourd’hui, quand il écrivait dans la préface de ce livre admirable, les Chouans: «La prospérité de la Bretagne était le fond même du procès entre La Chalotais et d’Aiguillon. Le mouvement rapide des esprits vers la Révolution a empêché jusqu’ici la révision de ce célèbre procès, mais lorsqu’un ami de la vérité jettera quelque lumière sur cette lutte, les physionomies historiques de l’oppresseur et de l’opprimé prendront des aspects bien différents de ceux que leur a donnés l’opinion des contemporains. Le patriotisme national d’un homme (Aiguillon), qui ne cherchait peut-être qu’à faire le bien qu’au profit du fisc et de la royauté, rencontra ce patriotisme de localité si funeste au progrès des lumières. Le ministre avait raison, mais il opprimait; la victime avait tort, mais elle était dans les fers; et en France le sentiment de la générosité étouffe même la raison. L’oppression est aussi odieuse au nom de la vérité qu’au nom de l’erreur. «M. d’Aiguillon avait tenté d’abattre les haies de la Bretagne, de lui donner du pain en introduisant la culture du blé, d’y tracer des chemins, des canaux, d’y faire parler le français, d’y perfectionner le commerce et l’agriculture, enfin d’y mettre le germe de l’aisance pour le plus grand nombre et la lumière pour tous: tels étaient les résultats éloignés des mesures dont la pensée donna lieu à ce grand débat. L’avenir du pays devenait une riche et féconde espérance.