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Amours d'Extrême-Orient: Illustrations d'après nature par Amédée Vignola

9781465667090
213 pages
Library of Alexandria
Overview
Il faut tenter une définition. Et l’étymologie n’aurait ici rien à faire. Nommez à un marin, non point à un globe-trotter, nommez Cadix ou Constantinople, joignez à ces mots la qualification « d’exotique », le marin se récriera. Citez Tahiti ou les Canaries : tout de suite il aura compris qu’on lui parle d’exotisme. Pourquoi ? Pourquoi, au jeu de faire tourner une mappemonde, n’importe lequel des errants, soulignera-t-il, dans la nomenclature des lieux de la terre, les uns exotiques, les autres quelconques ? Et, pour une même terre à classifier, le vote réunira l’unanimité des suffrages. C’est que reste, dès l’abord, en dehors du monde exotique, le monde cosmopolite. Les termes, à les peser, ne jurent pas ensemble. Des fragments de l’univers se sont unifiés et soudés, soit qu’ils fussent adjacents, comme les Etats d’Europe, ou qu’ils fussent rattachés aux précédents dans une tapisserie seulement plus lâche, la comparaison se décalquant sur l’écheveau des chemins qui juxtaposent l’Amérique du Nord à l’Europe. Le va-et-vient, l’échange mécanique, renouvelé surtout, est ennemi de l’exotisme : il apparaît, pour nous du moins, récepteurs dans la psychologie actuelle, il apparaît qu’une première condition de l’exotisme est de se limiter aux lieux « que l’on ne voit qu’une fois. » La règle souffre peu d’exceptions : l’évocation de Tong-Tabou ne saurait se préciser dans les mêmes lignes, après deux séjours entre lesquels fut de la vie. On signifie la collectivité entière du cosmopolisme, représentée par les membres qui s’en séparent momentanément, en route pour les buts inhabituels. Si vague que se présente cette collectivité, cette peuplade de la masse soudée du monde, son sens est assez net pour écarter le ridicule d’appliquer la première remarque au cas du rustre qui ne s’en vient qu’une fois à la ville, pour la conscription. Du principe découle aussitôt que le monde exotique comprend seulement des lieux où l’on ne vient que par mer. Non qu’avec cette limitation, les îles seules répondent à la définition. Y correspondent encore la multitude des cités, des sites, centres de rayonnement vers les cités, auxquels les communications mécaniques et terrestres ne sont pas imposées. Mais déjà il ne faut pas reculer devant l’inévitable conclusion, par delà l’analyse, l’évidence que la finalité de l’exotisme soit de ne s’appliquer qu’aux îles. Le langage usuel choisit encore, parmi le choix auquel nous sommes limités. Pour la plupart des gens, exotisme équivaut à perruches, bananes, hamacs, chaleur enfin. Bref, le royaume de l’exotisme est aussi celui du soleil, du soleil souverain. Si l’on joint à cette qualité celle révélée par les mots ordinaires aux marins, eux qui se plaisent à répéter les senteurs australes, la houle du Sud, le ciel austral, les mers australes, on fixera presque complètement les bornes des choses exotiques.