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Pauvre Petite!

9781465556226
pages
Library of Alexandria
Overview
Depuis quand nous connaissions-nous Louise et moi? Je n'en sais plus rien, nous nous étions souvent rencontrées, toutes petites, toutes les deux en grand deuil, elle, de son père, moi, de ma mère. Nos gouvernantes étaient en relations, nous avions fini par nous parler, nous nous étions plu, puis aimées, et cette amitié-là, nous ne l'avons jamais trahie. Mon père, plongé dans la douleur que lui avait causée la mort de ma mère, avait renoncé à toute espèce de luxe, et s'occupait peu de moi; il sortait toujours seul et ne me parlait presque jamais. Toutefois il ne négligeait rien pour mon bien-être et désirait que mon éducation fût soignée. La mère de Louise, au contraire, vite consolée, ne vivant que pour sa fille, travaillait à grand'peine à rétablir une fortune très compromise à la mort de son mari. Nos vies se ressemblaient donc, en somme, quoique par des raisons très différentes. Nous avons ainsi passé notre première enfance, nous cherchant toujours et toujours heureuses de nous retrouver. Que de douces heures se sont écoulées à nous confier l'une à l'autre nos importantes affaires... ces mille riens qui tiennent une si grande place dans les existences de dix à douze ans,... que sais-je, une promenade projetée et manquée, une leçon plus ou moins bien apprise! À cet âge, on ignore encore quel chapeau sied le mieux, ou quelle robe avantage la tournure; j'avoue pourtant à ma honte que Louise a commencé à s'en douter avant moi; elle me trouvait jolie, sans doute par bienveillance; quant à elle, elle devenait tout simplement très belle; aussi, vers la fin de sa dix-huitième année, elle fit un mariage inespéré, et, c'est le cas ou jamais de le dire: pour ses beaux yeux. Comme son mari était bien alors! Il avait un caractère des plus aimables, une intelligence au-dessus de la moyenne, et, avec cela, une fortune colossale.