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M�ires de Madame la Duchesse de Tourzel, Gouvernante des Enfants de France Pendant les Ann� 1789 �795

Croy d'Havr?LouiseElisabeth de

9781465553676
pages
Library of Alexandria
Overview
Les Mémoires que nous soumettons aujourd'hui au public n'ont, jusqu'ici, jamais été imprimés. Depuis fort longtemps la nombreuse descendance de madame la duchesse de Tourzel et le cercle restreint d'amis qui seuls avaient eu connaissance de ce précieux manuscrit en sollicitaient avec instance la publication, sans que madame la duchesse des Cars, petite-fille de madame de Tourzel, entre les mains de qui il était venu par héritage, ni, après elle, M. le duc des Cars, son fils, aient cru devoir accéder à ce désir. Les motifs d'une pareille réserve sont faciles à comprendre, si l'on se reporte par la pensée aux époques troublées que décrivent ces Mémoires. Toute la génération qui a traversé la période révolutionnaire a gardé des scènes terribles auxquelles elle avait assisté une impression dont la vieillesse même n'a pu éteindre la douloureuse vivacité. Lorsque, plus tard, la police de Napoléon Ier entoura d'une surveillance odieusement vexatoire les personnes que leur position et leur attachement connu à la famille royale désignaient à l'ombrageuse méfiance de l'Empereur, les habitudes de circonspection qu'elles avaient contractées pendant leur jeunesse devinrent la règle de conduite de leur vie tout entière, et ces sentiments s'étaient transmis à leurs enfants, témoins attristés des inquiétudes, parfois même des dangers auxquels leurs parents et eux-mêmes étaient exposés. Aujourd'hui, ces raisons n'existent plus, et le moment semble venu de restituer à l'histoire un document unique, qui, par son caractère particulier, ne peut être comparé à aucun de ceux dont se compose la riche collection des mémoires relatifs à la révolution française. Tous ceux, en effet, qui ont écrit sur cette funeste époque, ont joué un rôle personnel plus ou moins direct dans le drame qu'ils racontent; ils ont donc une tendance naturelle, inévitable, à présenter les faits sous le point de vue préconçu auquel leurs passions, souvent leurs intérêts, leur commandent de se placer. Madame Campan elle-même n'a pu échapper entièrement à ce reproche. Malgré le charme qu'inspire son touchant et respectueux attachement à l'infortunée reine Marie-Antoinette, on entend, parfois, dans sa voix comme un écho de susceptibilités froissées, comme un cri inquiet de sa personnalité, qui contraste péniblement avec l'émotion du lecteur. Cette impression, on la chercherait en vain dans les Mémoires de madame la duchesse de Tourzel: tout entière aux devoirs de sa charge, sa vie, ses affections, ses pensées se concentrent exclusivement sur les augustes enfants dont les épaisses murailles du Temple pourront seules la séparer. Aux heures les plus menaçantes des émotions populaires, lorsque la populace égarée envahit aux 5 et 6 octobre 1789 le château de Versailles, lorsque l'émeute traverse les salons des Tuileries le 20 juin 1792, lorsqu'au 10 août elle s'y établit triomphante sur les ruines de la monarchie, la gouvernante des Enfants de France trouve dans son dévouement à la famille royale la force d'étouffer le cri le plus sacré de la nature. On sent à peine un frémissement d'inquiétude aux dangers que court sa fille bien-aimée, cette charmante Pauline de Tourzel, dont le courage désarma les bourreaux de la Force lors des hideux massacres de Septembre. Mais si la personnalité de madame de Tourzel ne perce en aucun endroit de ces Mémoires, on y voit, presque à chaque page, comme un reflet des deux plus augustes victimes de la tragédie révolutionnaire: le roi Louis XVI et la reine Marie-Antoinette: c'est là ce qui fait un des principaux attraits de ces volumes